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Théories du complot et médias sociaux : un mélange meurtrier

Les théories du complot comme celles qui circulent aujourd’hui sur les médias sociaux sont fortement liées aux crimes violents, et particulièrement à ceux commis par l’extrême droite, selon un récent rapport. La diffusion croissante de ces constructions paranoïaques a déjà conduit à des meurtres et à de nombreuses attaques terroristes.

Si les théories du complot n’ont rien de nouveau (elles ont par exemple beaucoup contribué à la propagande antisémite des nazis), leur propagation actuelle sur les réseaux sociaux a grandement nourri le terrorisme d’extrême droite. C’est ce que montrent plusieurs études compilées par Daniel Allington dans un rapport réalisé pour le Réseau mondial sur l’extrémisme et la technologie (GNET).

Les théories racontant qu’un petit groupe de personnes contrôle secrètement le monde ont souvent conduit à des préjugés contre les membres de groupes minoritaires : juifs, immigrants, femmes, etc. Ce n’est pas différent de nos jours, mais la rapidité de diffusion a considérablement changé à cause des réseaux sociaux, explique Daniel Allington, qui enseigne les impacts sociaux et culturels de l’intelligence artificielle au King’s College de Londres.

« L’idée d’une association […] entre le conspirationnisme et la propagation d’appels au crime et de préjugés ethniques et religieux est clairement appuyée par les statistiques. »

Extrait du rapport Théories du complot, radicalisation et médias numériques

Il recense ainsi dans son rapport de très nombreux cas d’attaques violentes commises par des personnes qui s’étaient mises à adhérer à des croyances conspirationnistes. Par exemple, en 2011, sur l’île d’Utoya en Norvège, Anders Breivik a assassiné des dizaines de jeunes militants de gauche qu’il accusait de planifier le « grand remplacement » des blancs par des immigrants. Le spécialiste dénombre aussi plusieurs attentats complotistes dans des synagogues ou des mosquées, comme celui survenu à Christchurch en Nouvelle-Zélande en 2019.

L’assaut contre le Capitole à Washington en janvier dernier réunissait aussi nombre de personnes croyant qu’une grande fraude électorale avait eu lieu, de même que des adhérents de QAnon, cette théorie selon laquelle Donald Trump serait un héros en mission contre une secte de pédophiles contrôlant secrètement l’État américain.

C’est beaucoup sur les médias sociaux que les théories conspirationnistes se répandent aujourd’hui. Les plateformes comme Facebook et YouTube ont donc une importante part de responsabilité dans la flambée des violences xénophobes et de droite radicale, insiste Daniel Allington. Elles disposent d’un immense pouvoir qui leur permettrait de contrôler les discours circulant dans l’espace public. Mais cette perspective en rebute plusieurs, qui s’inquiètent d’une censure politique décidée par les grandes corporations.

Le Québec et le Canada n’échappent pas aux théories du complot, surtout pas depuis le début de la pandémie. Le rapport rappelle ainsi que de nombreuses manifestations visant à contester l’existence de la COVID-19 ont eu lieu au pays dans la dernière année. Un rapport récent du Centre d’études sur les médias de l’Université Laval indique aussi que plus de 20% des Québécois adhèrent à des thèses complotistes, notamment celles issues de QAnon.


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