Gaurav Sharma, ex-travailleur chez Dollarama Image : Jesse Freeston | Vimeo

Ces ex-travailleurs du Dollarama ont vu Nomadland : leur réaction est surprenante

On leur a demandé ce qu’ils avaient pensé de Nomadland, qui vient de remporter l’Oscar du meilleur film de 2020, et ces deux ex-employés d’entrepôt de Dollarama n’ont pas été tendres. Selon eux, la manière dont le film représente la vie des employés dans les entrepôts d’une grande corporation est complètement déconnectée de la réalité : voici pourquoi.

Le film Nomadland donne peut-être l’impression que travailler chez Amazon est une belle aventure, où on peut même se faire des amis tout en gagnant sa vie… mais la réalité est bien différente, selon Gaurav Sharma et Gabriel Dufour, qui ont connu le travail dans un centre de distribution de Dollarama et qui ont été interviewés dans un court documentaire de Jesse Freeston.

Dans Nomadland, on suit Fern, une femme américaine qui entreprend une vie de nomade après avoir perdu son emploi dans une usine. Elle joint les deux bouts en occupant différents emplois, notamment dans un entrepôt d’Amazon : elle semble étrangement confortable au sein de cette entreprise, qui a pourtant souvent fait les manchettes pour les traitements inhumains qu’elle réserve à ses employés

« Dollarama est notre Amazon à nous. »

Mostafa Henaway, du Centre des travailleurs et travailleuses immigrants

Gaurav Sharma et Gabriel Dufour se reconnaissent dans les personnages qui doivent se lever avant l’aube pour aller au travail, mais les scènes de Nomadland où on voit les employés être accueillis comme dans une grande famille, avec de chaleureuses salutations et des conseils de sécurité, ne leur rappellent rien.

Chez Dollarama, ils se sont plutôt fait imposer un rythme de travail effréné et dangereux, et on ne leur a offert ni l’encadrement ni le soutien nécessaires. Ainsi, alors qu’il travaillait comme chargeur de palettes, Gaurav Sharma s’est blessé au dos. Et quand il a demandé qu’on lui confie un travail plus sécuritaire, son employeur a tout simplement refusé et il a dû démissionner.

« On ne s’occupe pas des employés, là-bas. On fait juste dispatcher du monde comme […] des robots. Et une fois que le robot est hors d’usage, ben on en fait commander un autre auprès de l’agence. »

Gabriel Dufour, ex-travailleur chez Dollarama

Fern, la protagoniste de Nomadland, développe aussi de belles amitiés avec ses collègues chez Amazon. Mais cela est tout simplement impossible, selon les deux ex-employés de Dollarama. « On n’a même pas le temps de parler avec nos collègues. On est toujours pressés », raconte Gaurav Sharma. En tout temps, les superviseurs mettent de la pression sur les employés pour qu’ils gardent le silence et travaillent toujours plus vite. Et durant les pauses, les gens sont souvent trop fatigués pour avoir des conversations.

Si la vie des employés d’entrepôt est aussi dure, c’est pour que leurs patrons s’enrichissent toujours davantage, souligne Gabriel Dufour. En effet, Jeff Bezos, le grand patron d’Amazon est l’homme le plus riche au monde (une autre réalité que Nomadland préfère passer sous silence) et il a encore ajouté 24 milliards $ US à sa fortune depuis le début de la pandémie. Plus près de nous, la famille Rossy, qui possède Dollarama, est l’une des plus riches du Canada : tandis que ses employés gagnent à peine le salaire minimum, elle est assise sur une fortune de 2,52 milliards $.


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